Comprendre la hausse des prix de l’énergie
Par Christophe Tunica
Cela n’a échappé à personne ; les prix de l’énergie flambent ; et pas seulement en France… C’est le cas partout en Europe, voire dans le monde. La cause du phénomène n’est pas unique, il s’agit d’une conjonction de différents facteurs… Quels sont-ils, et quelles réponses peut apporter l’Etat français ?
Hausse des prix de l’énergie : les différents facteurs
L’équilibre offre / demande
L’effet rebond post crise sanitaire
La crise sanitaire a généré une réduction de la demande énergétique, notamment du fait d’une baisse globale des productions industrielles. La loi de l’offre et de la demande a ainsi fait baisser les prix du KW, jusqu’à atteindre même, des prix plancher. Dès lors que la pandémie a commencé à marquer le pas et que la reprise économique s’est amorcée, le niveau de la demande globale a fortement augmenté… Et les prix ont suivi ! C’est particulièrement le cas en Asie, qui a vu les prix du Gaz Naturel Liquéfié (GNL) et du charbon exploser.
Les aléas climatiques
Les températures qui deviennent de plus en plus extrêmes (périodes de canicule et sècheresse, mais également vagues de froid successives dans certaines zones de la planète) contribuent aussi à entrainer des hausses de consommation énergétique, que ce soit pour la climatisation ou le chauffage.
Un approvisionnement mondial sous tension
La quasi-totalité de la demande française de gaz naturel est aujourd’hui satisfaite par des importations qui proviennent principalement de 5 fournisseurs, à savoir :
- La Norvège, qui représentait 36% des entrées brutes de gaz en France en 2019 ;
- La Russie pour 20%,
- Les Pays-Bas et le Nigéria à hauteur de 8% chacun,
- L’Algérie, pour 7%.
Or, à la fin de l’été dernier, les stocks de gaz Européens étaient en situation de sous-remplissage (25% en dessous de leur niveau de 2020 à la même période) à cause de perturbations enregistrées chez différents fournisseurs comptant parmi ce top 5 :
La Norvège :
Contrairement à une idée assez répandue, le premier fournisseur de la France n’est pas la Russie mais la Norvège. Or, ce pays a décidé d’une diminution de la quantité de son gaz exporté en Europe suite à de nombreuses opérations de maintenance ; créant ainsi un manque, et une inquiétude sur les marchés.
La Russie :
Afin d’honorer la demande européenne, la Russie avait prévu, à l’automne 2021 d’achever la construction du gazoduc Nord Stream 2, démarrée en 2018 par l’entreprise russe Gazprom. L’objectif de ce gazoduc ? L’acheminement de 55 milliards de m3 de gaz supplémentaires par an vers l’Europe. Or ; du fait de tensions géopolitiques locales, ce projet de gazoduc européen a été mis en suspens. Dans le même temps l’approvisionnement de la Russie aux pays européens s’est aussi trouvé fortement perturbé suite à différentes maintenances sur les installations gazières, et aux violents incendies qui se sont déclenchés dans les champs gazier d’Urengoy.
Le Quatar :
Enfin, les livraisons européennes de GNL en provenance du Qatar sont également restées faibles depuis janvier, en raison des prix élevés en Asie, continent qui absorbe une grande part de la production du Quatar.
La hausse du prix des droits d’émission du CO2 :
En Europe, les entreprises, et les producteurs d’énergie eux-mêmes, sont soumis à des droits d’émission de CO2… Ainsi, au-delà d’une certaine quantité émise, ces opérateurs économiques doivent acquitter des « droits d’émission ». Ceci afin de favoriser une production plus verte, et d’inciter les entreprises à réduire, le plus possible, leurs émissions de CO2. Or, l’Union Européenne a décidé fin 2020, de réhausser les objectifs de réduction d’émission des gaz à effets de serre à 55%, d’ici 2030. Cette décision a entrainé une augmentation du droit d’émission de CO2, c’est-à-dire un surcout que les fournisseurs d’énergie ont répercuté sur le prix de l’électricité et du gaz fournis aux particuliers.
L’augmentation des taxes et contributions
La fiscalité pèse très lourd dans le prix de l’énergie : les taxes représentent en effet environ 30% de son cout total. La moindre augmentation de ces taxes impacte donc directement le prix du produit fini.
Hausse des prix de l’énergie : quelles réponses apporte l’Etat Français ?
La Commission de régulation de l’énergie
Créée en 2000, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) est chargée de veiller au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz en France, au bénéfice des consommateurs finaux, et en cohérence avec les objectifs de la politique énergétique. Elle est notamment consultée lors de la fixation des tarifs des offres soumises aux tarifs réglementés – celles proposées par les fournisseurs historiques EDF et Engie – dont les prix sont fixés par l’État.
Les aides conjoncturelles
Le gouvernement français, afin d’enrayer la hausse du prix du gaz et de l’électricité pour les ménages français a mis en place depuis 2018 le « chèque énergie ». Ce dispositif remplace celui des tarifs sociaux. Ainsi, les bénéficiaires du tarif de première nécessité (TPN) pour l’électricité et/ou du tarif spécial de solidarité (TSS) pour le gaz, se voient verser une aide nominative. Par ailleurs, dans le contexte actuel de flambée des prix du gaz, de l’électricité, du carburant, et plus généralement des produits de grande consommation, le gouvernement français a décidé de mettre en place un dispositif supplémentaire. Là encore, l’option choisie n’a pas consisté à une baisse des « taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques ». La solution retenue est le versement d’une nouvelle aide appelée « prime inflation ». Ce sont donc plusieurs millions de ménages français, dont les revenus mensuels sont inférieurs à 2000 € qui vont recevoir d’ici la fin de l’année, ce chèque de 100 euros. Un léger coup de pouce ponctuel destiné à amortir la hausse du cout du gaz et de l’électricité… Ainsi que l’inflation plus globale qui s’installe en France…